Vidéo Online : 2007 sera l'année des concentrations
Les
plate-formes contributives de vidéos se sont multipliées en l'espace de
très peu de temps sur le Net. En Europe et aux Etats-Unis, on en
dénombre 25 actives (UGC - User Generated Content). Pourtant, cette activité est très fragile et 2007
pourrait constituer un virage majeur pour ce marché.
L’usage de la vidéo en ligne connaît toujours une croissance exceptionnelle. Et les chiffres le confirment : le nombre de
visiteurs de sites de partage de vidéo a augmenté en France de 75 % en
un an.
Un modèle gratuit difficile à rentabiliser
Le chiffre d'affaires de YouTube pour 2006 : 15
millions de dollars (chiffre non confirmé, mais non démenti).
Le
modèle gratuit financé par la publicité semble toujours aussi complexe
à mettre en oeuvre tandis que les coûts, eux, sont bien identifiés :
stockage en Datacenter, bande passante, serveurs d'encodage, lutte
contre les contenus illicites, partage de revenu et...procès (Viacom
réclame par exemple à YouTube 1 milliard de dollars, soulignant le fait
que l'essentiel du trafic est généré par des contenus illicites).
Du
fait de ces charges cumulées, les coûts réels pour mille (CPM) des
vidéos vues semblent difficiles à faire descendre en dessous de 30
dollars alors que les publicités en démarrage de vidéo (pre-rolls) se
négocient souvent à partir de 5 dollars le CPM, sans jamais dépasser
les 40 dollars. La fenêtre de rentabilité est donc très étroite.
Un coût de bande passante énorme
L'une
des principales sources d'inquiétude pour ces plate-formes reste le
coût de la bande passante. Pourquoi ? Parce que nombre d'entre elles
ont construit leur modèle en s'appuyant sur un tarif de bande passante
"virtuel". En effet, une partie significative des opérateurs pratiquent
ce qu'on peut qualifier de "surbooking de bande passante" : la bande
passante est revendue jusqu'à dix fois à des hébergeurs, simplement
parce qu'elle n'est pas consommée. Or les plate-formes d'UGC font
écrouler ce modèle : la bande passante achetée est réellement
consommée ; autrement dit, il n'est pas rare que l'opérateur vienne
présenter la note réelle lorsque l'activité commence à décoller.
La rentabilité passe par une taille critique et un ciblage
des audiences qu'aujourd'hui vraisemblablement seuls quelques acteurs
comme YouTube ou Dailymotion peuvent atteindre, si les procès des
Majors ne viennent pas changer la donne.
2007, l'année des concentrations
Il
est probable que pour ces différentes raisons le marché connaisse
courant 2007 une vague de concentrations comparable à celles qu'ont pu
connaître les acteurs de l'Internet en 2001. Et comme en 2001, il y a
fort à parier que cette période laissera des traces.
Notamment
dans le monde du B2B et B2B2C : les acteurs se sont aussi multipliés
dans ce segment de marché, attirés par l'effet de mode, et souvent avec
une tarification impactée par la gratuité des plate-formes de type
YouTube. Or la carte du gratuit en B2B est risquée, car ce qui peut
être permis dans une phase d'amorçage ou d'acquisition initiale de
clientèle ne peut plus l'être dès que l'on passe la vitesse supérieure
: si le modèle n'a pas été d'emblée construit pour être rentable, il ne
peut l'être à terme, les effets de levier du C2C étant inexistants dans
ce type de contexte.
2007 sera donc une période charnière pour
ce secteur, aussi bien dans le C2C que dans le B2B. D'autant que
l'innovation technologique ne suffira pas à créer la différence : on
s'approche du maximum des fonctionnalités usuelles attendues par le
public. La capacité à maîtriser ses coûts, à mettre en ordre de marche
la structure pour qu'elle soit rentable, à structurer les offres pour
répondre à des attentes finançables sera clé. Il s'agit d'une bataille
opérationnelle, marketing et commerciale exceptionnelle qui s'amorce,
aussi rude que celle des années 2000. La consolidation ne fait que
commencer, et il est fort possible qu'elle s'opère dans une plage de
temps très serrée.
Lu dans le JDN - le 15/03/2007